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Helium
18 juillet 2011

CHAPITRE 14

Le 1er mai est tiède et très ensoleillé. Jodie court avec une respiration régulière dans la campagne. Elle fait son jogging matinal pour éliminer les kilos emmagasinés durant sa convalescence et pour se réhabituer au sport. Les oiseaux chantent. La jeune sportive arrive bientôt à la lisière de la forêt. Elle s’assied quelques minutes au pied d’un arbre. Ses jambes ruissellent de sueur, son visage aussi, son short et son maillot sont trempés. Elle observe un petit oiseau sur une branche. Elle se concentre, elle appelle sa force pour que l’animal vienne se poser sur sa main, mais en vain. Sa force, elle ne la possède plus. Son cœur se met à battre plus vite, elle ressent l’envie de pleurer. Plus jamais elle ne pourra faire rougir ses yeux. C’était pourtant bien utile. Plus jamais elle ne pourra lire dans les pensées d’un être humain, forcer un individu à agir comme elle l’avait décidé. Il ne lui reste plus de son instinct héliumien que sa mémoire prodigieuse. Comment va-t-elle faire pur retrouver sa vraie famille sans sa force ?

Le petit oiseau s’envole farouchement. Maintenant, Jodie voudrait redevenir héliumienne. Elle regrette le temps où elle pouvait avoir les yeux rouges. Mais n’était-ce pas son souhait d’être une simple terrienne ? Ne haïssait-elle pas sa force lorsqu’elle la possédait ? Il est vrai qu’elle s’en voulait parfois d’être commandée par cet instinct extra-terrestre, mais maintenant qu’elle l’a perdu, la pauvre fille se sent comme handicapée. Elle murmure :

-          Tu n’es plus qu’une simple terrienne. Une simple terrienne, rend toi à l’évidence…

Elle se lève et se remet à courir à petites foulées vers le chemin de sa maison.

Du bout de la rue, Jodie aperçoit une voiture qui lui est inconnue. Elle allonge ses foulées pour arriver devant la maison où est garé le véhicule. C’est une superbe Ferrari rouge dernier modèle. La jeune fille la contemple un moment. Apparemment, le propriétaire se trouve actuellement chez elle. Elle entre par le jardin d’où elle entend des voix. Elle arrive à cinquante mètres de la terrasse et s’arrête net, comme figée sur place. Ses grands yeux bleus fixent la terrasse : autour de la table, sous le parasol se trouve son père, sa mère et Laetitia. Deux individus lui tournent le dos mais elle n’a pas besoin de voir leur visage pour les reconnaître. Ca ne peut être que … John et Mike !

M. Dupuis se lève et dit à voix haute en direction de Jodie :

- Jodie, ma chérie, tu vois qui est là ?

A ce moment, les deux invités se lèvent et se retournent. Jodie accoure dans les bras de John. Les Dupuis regardent très étonnés cette scène de retrouvailles. La convalescente lâche John après l’avoir tendrement embrassé, puis elle saisit à son tour Mike dans ses bras.

Enfin, tout le monde se rassoit, et Jodie s’exclame :

-          C’est merveilleux, vous êtes là !

Dans son accent américain, John s’exclame à son tour :

-          Nous sommes venus spécialement pour te voir Jodie. Nous n’habitons plus sur Hélium, nous sommes revenus vivre en Amérique.

-          Génial ! Mike, je suis contente pour toi.

-          Oui, je vais pouvoir vivre comme un terrien maintenant. Papa a abandonné le plus rapidement possible ses recherches pour que l’on puisse passer les vacances d’été sur Terre.

-          Quelle merveilleuse idée !

M. Dupuis ordonne alors à sa grande fille d’aller se changer pour que l’on puisse servir le déjeuner.

 

Jodie contemple songeuse sa garde robe, une serviette nouée autour d’elle. Elle vient de prendre une douche et cherche une tenue qui soit digne d’un si grand jour. Elle étale sur son lit toutes ses toilettes et se décide enfin pour sa robe de mousseline rouge. Tout à coup, elle se rappelle que Mike est en jean, laors elle enfile finalement le sien. Elle choisit un petit chemisier court à fleurs, elle relève sa crinière bouclée en chignon et elle se maquille. Enfin, elle place à ses oreilles ses anneaux en argent, se chausse de souliers plats en daim noir. Avant de descendre, elle jette un dernier regard satisfait dans le miroir : elle est parfaite.

Elle descend les marches quatre à quatre, sort dans le jardin et aide sa mère à placer le couvert sur la table de la terrasse. Mme Dupuis siffle d’admiration lorsqu’elle voit arriver sa fille dans la cuisine :

-          Waouw ! Tu es plus que ravissante !

Laetitia qui entre dans la cuisine à ce moment-là ajoute :

-          C’est pour plaire à Mike, voyons !

-          Tais-toi petite sotte ! Rétorque Jodie, rougissante.

Le déjeuner est très agréable. Jodie pense que c’est le plus beau jour de sa vie.

Les Dupuis font visiter la ville aux américains. Le soir, ceux-ci dorment à l’hôtel. Ils sont là pour une semaine. Malheureusement, ces sept jours passent à une vitesse folle. Le départ arrive. Jodie voit disparaître ses amis dans la Ferrari rouge qu’ils ont louée. Elle se retourne pour ne pas montrer qu’elle verse des larmes. Mais la séparation sera de courte durée puisque John a invité toute la famille de Jodie à venir aux USA pour une dizaine de jours au mois d’août.

 

***

 

Jodie rattrape ses cours par disquettes sur son ordinateur. Elle y met toute sa volonté, tout son courage. Après les vacances, elle devra retourner en classe et elle en veut pas redoubler.

 

***

 

Après trois heures de vol, l’avion atterrit à New York. La famille Dupuis sort de l’aéroport et prend le taxi en direction de l’hôtel où ils séjourneront. Après un brin de toilette, ils se rendent chez les Birdman.

C’est Mike qui leur ouvre la porte. Il les accueille avec un grand sourire par lequel Jodie peut lire son immense joie. Il les fait entrer dans le petit studio. Jodie laisse échapper un petit rire quand elle constate que le désordre y règne tout comme dans la maison héliumienne. John les accueille à son tour et les invite au restaurant. Après le dîner, et une visite guidée de la ville, chaque famille regagne sa voiture. Avant que Jodie ne monte, Mike lui demande :

-          Est-ce que vous êtes fatiguées Laetitia et toi ?

-          Oui, moi je ne tiens plus debout ! s’exclame la petite sœur.

-          Pas moi, je suis encore en pleine forme, pourquoi ? questionne Jodie.

-          Je te propose d’aller à la piscine au dessus de notre immeuble si tu es d’accord.

-          Oh oui, bien sûr ! Je n’ai jamais vu de piscine au dessus d’un immeuble aussi haut que celui que vous habitez !

-          Elle est super, tu verras !

La jeune fille demande la permission à ses parents de se rendre à la piscine, ils acceptent.

 

John quitte les jeunes gens au onzième étage, celui où se trouve le studio.

 

Jodie et Mike continuent à grimper jusqu’au sommet du gratte-ciel. L’ascenseur se stabilise puis s’ouvre. La jeune fille est surprise de constater qu’ils se trouvent à présent dehors sous la lune et les étoiles scintillantes, devant une piscine de forme ovale très vaste. Elle ne peut s’empêcher de siffler d’admiration :

-          Qu’elle est grande ! Je n’aurais jamais imaginé qu’il puisse exister une si belle piscine au sommet d’un gratte-ciel !

Des lampadaires blancs sculptés éclairent l’eau bleue azur. Une dizaine de baigneurs nagent. Ils ont l’air tout à fait détendus et heureux. Jodie est pressée de les imiter. Mike questionne Jodie :

-          Tu sais nager ?

-          Oui, bien sûr ! Et toi ?

Il lui répond par un hochement de tête et s’avance sur le plongeoir. Il saute dans l’eau avec un admirable plongeon. Jodie plonge à son tour. La jeune fille n’a jamais nagé dans une eau aussi agréable. Les jeunes gens font quelques longueurs à la brasse, ils s’accoudent ensuite sur le bord pour souffler. Après quelques instants de récupération, le jeune homme défie Jodie :

-          Allez ma petite héliumienne, on fait la course ?

Il part en flèche mais après avoir fait cinq ou six mètres, il s’aperçoit que Jodie ne l’a pas suivi. Il fait demi-tour et revient près d’elle. Ses sourcils se froncent lorsqu’il constate que les yeux de son amie sont mouillés de larmes ! Ou bien est-ce seulement son visage qui est mouillé par l’eau ? Mais Jodie baisse la tête, elle ne sourit pas du tout, son menton tremble. Mike s’approche et murmure :

-          Tu pleures ?

-          Ce n’est rien ça va passer, rétorque Jodie.

-          Mais enfin, qu’est-ce qui te prend ?

-          Tu as réveillé de mauvais souvenirs, ça va passer.

-          Qu’est-ce que j’ai dit ?

Jodie détourne les yeux puis elle essaie en vain de retenir d’autres larmes. Elle éclate alors en sanglots.

-          Je ne suis plus héliumienne, c’est fini tout ça !

Alors, Jodie explique à Mike en suffoquant qu’elle a perdu la force qui lui faisait rougir les yeux et qui lui octroyait des pouvoirs surnaturels, car toute son énergie s’était épuisée pour la guérir du coma.

Mike la fixe un moment de ses grands yeux gris. Il soulève le menton de la jeune fille de sa main et lui murmure :

-          Arrête de pleurer. Tu sais, je suis content que tu sois des miens maintenant… et tu me plais toujours autant. Il s’approche encore plus près d’elle et l’entoure de ses bras, il pose délicatement un baiser sure ses lèvres. Soudain, Jodie s’esquive sous l’eau pour réapparaitre quelques mètres plus loin en souriant malicieusement. Elle s’écrie en imitant l’accent américain du jeune homme :

-          Alors superman, on la fait cette course ?

Mike fait mine de bouder mais il s’élance vers l’autre extrémité du bassin. Ils arrivent à égalité. Le jeune homme, le souffle court, s’exclame :

-          Jamais une fille ne m’a donné autant de fil à retordre, bravo !

La jeune fille lui arrache un furtif baiser et réplique :

-          Qu’est-ce que tu crois ? Toutes les filles ne sont pas forcément nulles en sport !

 

***

 

Les Dupuis ont suitté New-York à grands regrets mais Jodie est joyeuse à l’idée qu’elle reviendra dans cetre ville en septembre pour la rentrée universitaire. En effet, ses parents ont jugé bon qu’elle entre dans la grande école scientifique de New York, là où va aussi Mike. John lui a proposé de la loger chez lui gratuitement.

 

***

 

Un soir, dans le petit studio, John et son fils adoptif discutent :

-          Alors, mon fils, dans moins d’un mois, nous aurons une nouvelle pensionnaire !

-          Papa, tu as vraiment eu une bonne idée d’inviter Jodie à venir habiter ici. Jodie est une fille exceptionnelle.

John parait réfléchir un instant. Il reprend :

-          Et dire que j’aurais une fille de cet âge si elle était venue au monde !

-          C’est l’enfant que ta femme attendait, n’est-ce pas ?

-          Oui… Oh, Mike,  je pense tous les soirs à ma femme et à sa mort tragique. Si je travaille autant, c’est pour oublier ce malheur. Comprends-moi. Je me sens si coupable de ne pas m’être occupé de toi comme il le fallait, j’ai gâché quinze ans de ta vie en t’emmenant sur Hélium avec moi. Je me suis servi de toi comme un réconfort à mon chagrin…

-          Non papa, tu es le père le meilleur que l’on puisse avoir. Mais il faudrait que tu te trouves une autre femme et que tu penses un peu moins à ton passé…

-          C’est impossible ! Jamais je ne pourrai… Vergilax est morte par ma faute, je…

-          Vergilax ? Mais c’est un prénom héliumien !

John lève la tête. Ses yeux sont remplis de larmes. Il murmure :

-          Oui, en effet. C’est une chose que je ne t’ai jamais dite. Ma femme était héliumienne. Aujourd’hui, je peux te le dire, ça n’a plus d’importance : elle a été assassinée par une organisation de terroristes. Ils l’ont kidnappée pour que je leur donne en échange la formule de la composition d’un gaz sur Hélium que j’avais découvert. Vergilax était enceinte de huit moi, elle attendait une fille. Elle avait aussi un métier qui touchait à la science. Elle m’avait accompagné en France quand c’est arrivé. Ils l’ont enlevée le lendemain de notre arrivée. J’ai reçu des messages m’avertissant que si je ne leur donnais pas les formules du gaz, ils la tueraient. J’ai engagé une police spécialisée, ils n’ont pas su me rendre ma femme. Je suis resté de longs mois sans avoir aucune nouvelle, puis un jour, j’ai reçu un message sur mon ordinateur : ils l’avaient tuée. Je ne leur ai jamais cédé la formule, plutôt mourir… Ils ont fini par abandonner. Après cette horrible nouvelle, j’ai sombré dans la dépression. Et puis, pour m’obliger à vivre, je t’ai adopté. Lorsque nous nous sommes rencontrés la première fois, tu avais deux ans.

Après quelques secondes de silence, Mike dit :

-          Si ta femme est morte quelques mois après son enlèvement, elle a du accoucher entre temps…

-          Ils ont certainement tué le bébé aussi. Ils ne m’ont rien dit à ce sujet… Ces pourritures…

Mike se met à réfléchir. Son cœur bat à tout rompre. Il embrasse son père sans rien ajouter et part se coucher mais il ne dort pas de la nuit à cause de l’idée qui vient de naître en lui…

 

 

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